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[CP] L’ONU fustige la France : la persistance du profilage racial systémique en question

14 novembre 2024 dans dans Discriminations

Dans ses observations publiées le 7 novembre, le Comité des droits de l’homme des Nations unies pointe la violation par la France de ses obligations internationales en matière d’égalité et de non-discrimination. Il souligne « l’usage disproportionné par les forces de l’ordre de leurs pouvoirs d’interpellation et de fouille à l’égard de personnes appartenant à des groupes raciaux ou ethniques minoritaires (profilage racial) et s’inquiète de que ces contrôles ne fassent l’objet ni d’un contrôle judiciaire systématique ni d’un suivi statistique adéquat. »

Paris – le 12 Novembre 2024, COMMUNIQUÉ DE PRESSE.

Le Comité préconise que l’État français prenne « les mesures nécessaires afin de prévenir le profilage racial dans le cadre des contrôles d’identité par les forces de l’ordre, recueille systématiquement des données permettant d’évaluer les résultats des mesures prises et le cas échéant les ajuster, et faire en sorte que les allégations de profilage racial donnent lieu systématiquement à des enquêtes approfondies, que les auteurs, s’ils sont reconnus coupables, soient sanctionnés de manière appropriée, et que les victimes reçoivent une indemnisation adéquate ».

Les experts ont également exprimé leur inquiétude concernant le ciblage disproportionné des personnes appartenant à des groupes raciaux ou ethniques minoritaires par des amendes forfaitaires délictuelles sans contrôle judiciaire. Ils demandent à l’État de s’assurer que la mise en œuvre de ces amendes « soit soumise à un contrôle judiciaire adéquat pour éviter toute discrimination. »

Ces observations font suite au dialogue entre le Comité d’expertes et les autorités françaises qui a eu lieu à Genève fin octobre, lors de l’examen de la mise en œuvre du Pacte International relatif aux droits Civils et Politiques par la France. Les expertes ont posé de nombreuses questions à la délégation française relatives aux contrôles d’identité discriminatoires.

Plusieurs associations participant à la lutte contre les contrôles discriminatoires ont présenté des soumissions écrites et témoignages oraux devant les experts à Genève. Elles dénonçaient les impacts significatifs de ce harcèlement discriminatoire routinier, la minimisation du problème par les autorités et l’absence de toute mesure visant à y mettre fin. Elles ont, encore une fois, souligné qu’un problème systémique nécessite une réponse systémique, incluant notamment la modification du cadre normatif des contrôles d’identité, la protection spécifique des mineurs, la modification des politiques qui facilitent les pratiques discriminatoires, un système d’enregistrement, d’analyse et de traçabilité des contrôles ainsi qu’un mécanisme de plainte efficace et indépendant chargé de toutes les enquêtes administratives et pénales.

La délégation des autorités françaises a cependant, persisté à nier une réalité, pourtant largement documenté, et a clôturé le dialogue en indiquant que « tout profilage ethnique ne saurait exister au sein de notre République ; elle s’en préserve par notre législation et nos institutions ». Cette prise de position illustre un manque de considération pour les victimes de ces pratiques discriminatoires ainsi que pour les membres du Comité.

La position de la délégation française est d’autant plus choquante qu’elle vient un an après la décision du Conseil d’État du 11 octobre 2023, constatant l’existence des contrôles discriminatoires. Le Conseil d’État avait cependant refusé d’ordonner la mise en œuvre de mesures pour faire face à ce problème, estimant qu’il s’agissait du rôle du gouvernement. Devant le Comité des Droits de l’Homme, les autorités françaises se sont inscrites en faux par rapport à cette décision de la plus haute juridiction administrative, signifiant ainsi que l’égalité reste une promesse vide pour des millions de personnes en France.

Nos associations saluent les conclusions du Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies, dans lesquelles il reconnaît la souffrance de celles et ceux qui subissent les contrôles discriminatoires d’identité au quotidien, et elles enjoignent les autorités françaises à respecter les principes d’égalité et de non discrimination.

Nos associations demandent donc à la France de prendre en compte les recommandations du comité pour mettre fin à cette pratique discriminatoire systémique.

Contacts presse

  • Grégory Bianchi Perla (Amnesty International France) : gbianchi@amnesty.fr
  • Erika Campelo (VoxPublic) : erika.campelo@voxpublic.org